La photographie c’est assez drôle, tu commences en étant nul, tu progresses en étant pas bon du tout, puis tu progresses encore et t’es juste passable. A chaque fois lorsque tu regardes tes précédentes photos tu te dis “mais qu’est ce que j’étais nul, comment j’ai pu faire ces erreurs pendant des années” et ce processus se répète tout le temps (l’avantage c’est que t’as toujours l’impression d’être fort).

Dans cet article je vais donc vous expliquer les bêtises que j’ai faites pendant des années, vraiment des années ! C’est un bon complétement à mon article sur les 10 règles de base à connaitre en photographie donc allez le lire si ce n’est pas déjà fait.

Erreur #1 : Trop zoomer sur les visages pour mes portraits

J’aurais absolument adoré avoir plus d’expérience lorsque j’ai fait des photos en Birmanie car je pense que j’ai énormément foiré des portraits (alors que j’en ai déjà des incroyables). En fait je comprenais le portrait comme la photo d’un visage. Ca m’a réussi par moment mais j’aurais pu faire mieux.

Avec l’expérience ou les cours photos (dont on va parler bientôt) j’ai commencé à comprendre qu’un portrait ça pouvait être autre chose, par exemple qu’on pouvait raconter une histoire différente en zoomant énormément sur un élément du visage, en prenant en photo autre chose (des mains, un oeil ?).

C’est très difficile à faire car il faut entraîner son oeil, à quel moment couper un visage

Les photos de ce paragraphe auraient été impossibles à réaliser pour moi avant 2020. Je pense que je n’avais pas la mécanique intellectuelle de me focaliser sur ce point pour en tirer une photo, j’aurais peut-être zoomé sur les mains une fois ou deux mais je n’avais pas compris à quel point insister sur un petit élément pouvait rendre ma photo si puissante.

Erreur #2 : Ne pas assez faire de cours photos

J’espère toujours faire des photos de maboule et pourtant j’ai au final fait assez peu de tours photo dans ma vie (bon quelques uns quand même), je n’ai jamais acheté de livre sur la photographie, je ne consulte pas les albums des grands photographes, je fais jamais de photos avec d’autres photographes… donc à un moment ça tombe pas du ciel. C’est un peu comme Zidane, il était doué de base mais il s’est pas réveillé un matin en mettant des reprises de volées dans la lucarne, il y a du travail, de l’apprentissage, etc.

Analyse et discussion sur nos meilleures photos après un photo tour, de quoi avoir une autre vision et comprendre d’autres choses !

Dans la pratique après chaque cours photo j’ai eu l’impression d’apprendre un truc en fonction du photographe que j’avais en face (ou d’autres élèves). Si je vous partage les derniers j’ai vraiment beaucoup appris pendant mon tour de 3 jours dans le Centre (notamment sur les lignes, sur le fait de prendre des photos sombres, sur les portraits qui ne sont pas forcément des visages, etc.).

J’ai aussi appris à ne pas avoir juste la dame qui est bien placée avec un beau paysage, mais avoir ce même cliché avec de l’action (le riz qui bouge, l’eau qui bouge, des rameurs en pleine action, etc.). Pour faire simple :

  1. Quand tu débutes tu essayes d’avoir une photo claire et facile à comprendre (la dame dans l’eau sans trop d’éléments distrayants)
  2. Puis tu progresses et tu essayes d’avoir une meilleure composition (la mer au niveau d’un tier et plus simplement au milieu)
  3. Puis tu arrives à intégrer plusieurs éléments dans ta photo (la dame et les bateaux en arrière-plan qui apportent quelque chose)
  4. Puis tu arrives à prendre la photo au moment parfait (l’eau qui tombe du panier, les rameurs dans une position relativement correcte)
  5. La prochaine étape… j’y suis pas encore !

Avec Regis pendant mon voyage à Angkor j’avais été très marqué par l’attention qu’il portrait à la lumière, honnêtement ça ne s’est pas trop vu dans les temples (car forcément la lumière est assez diffuse) par contre une fois dans le village flottant il avait vraiment l’œil sur les puits de lumière dans les habitations. C’est donc un point sur lequel je fais aussi très attention désormais.

Il ne faut cependant pas mettre de côté que les tours photos sont onéreux, on paye quasiment tout le temps un étranger qui a des compétences particulière. C’est généralement autour des 100$ la journée (par personne) et on a souvent pas la mécanique intellectuelle de se dire “ça vaut le coup”, on a plutôt tendance à penser “putain c’est 3 nuits dans mon hôtel”.

Difficile de faire des généralités mais récemment j’ai vu une interview d’un photographe en Asie qui disait :

Si tu commences la photo ça sert à rien de passer du temps pour savoir “quel matériel photo acheter avec mon budget”. Il faut plutôt acheter un appareil photo pas trop mal et un peu ancien, puis dépenser (argent & temps) en se formant pour savoir utiliser cet appareil et apprendre la photographie en général.

Erreur #3 :  Pas assez monter les ISO

J’ai appris la photographie en pensant que les ISO représentaient le mal absolu, du coup j’avais tendance à avoir énormément de mal à grimper au dessus des 1000 ISO. Quand je voyais qu’à 1000 ISO et ouverture pleine j’avais une vitesse à 1/10 je me disais “on tente”.

Lorsque tu fais des photos dans des endroits sombres, souvent tu vas avoir tendance à ouvrir au maximum (~F2.8 ou F4), si tu bloques tes ISO (par exemple à 1000 maximum) dans ce cas ta vitesse va être gérée automatiquement par l’appareil, si c’est très sombre tu vas tomber à des vitesses très basses (j’aurais dû écrire trop basses) genre 1/10, 1/4, etc.

Note : Pour une photo à 1/4 cela veut dire que l’appareil prend la photo en 0.25 secondes, s’il y a un mouvement il va y avoir un flou. Souvent à 1/4 il y a plusieurs flous qui s’additionnent (le sujet bouge mais… toi aussi tu bouges un peu !).

Dans les marchés c’est très clairement impossible de faire une photo correcte avec une vitesse 1/10, les gens bougent trop vite et en dessous de 1/100 c’est très difficile de faire quelque chose de correct. Les photos ci-dessous sont prises à ISO 800-2000 en suivant cette règle de ne pas shooter en dessous de 1/100 de vitesse (à 1/100 l’appareil photo prend le cliché 25 fois plus rapidement qu’à 1/4, autant vous dire que le flou est beaucoup moins présent !).

Avec le temps j’ai désormais beaucoup moins de mal à monter les ISO et… je sors donc des photos correctes à certains endroits où j’en aurais été incapable auparavant. Un bon exemple :

1/125, F3.5, ISO 2000 – il y a 2 ans ça c’était une photo loupée

Sur la photo ci-dessus j’ai d’abord choisi mon ouverture (entre F3 et F4 pour avoir une grosse ouverture sans avoir de gros risque de manquer la mise au point), puis la vitesse minimum que je voulais (1/125 me paraissait la limite basse, j’aurais pu viser plus haut jusqu’à 1/250). Du coup les ISO pour avoir une photo correcte c’était 2000… et j’ai mis 2000.

Comment se louper : Pour faire une photo avec des ISO plus faibles (1000) j’aurais pu ouvrir à F2.2 par exemple, cependant la zone où la photo sera nette (la mise au point) sera beaucoup plus faible et… vu que je suis sur un bateau qui bouge je ne voulais pas prendre le risque d’avoir l’impression de faire une belle photo pour qu’elle soit en fait loupée après : “ah ben en fait le mec était pas en focus”.

Erreur #4 : Voyager normalement mais quand même vouloir faire des photos superbes

Il faut bien comprendre une chose mais j’ai toujours voulu faire de belles photos, enfin surtout depuis la Birmanie et depuis que le blog est vraiment devenu important (c’est gratifiant lorsque les gens en parlent).

Pourtant il m’a fallu des années avant de comprendre que sans te lever tôt tu vas courir pendant longtemps après des photos incroyables. C’est pas en te levant à 8h et en faisant parfois un coucher de soleil que tu vas sortir des photos de dingue (ou pas beaucoup). Quand t’es sur le pont au lever de soleil et au coucher de soleil tu te donnes 10x plus de chance de faire de très belles photos. C’est bête mais c’est vrai.

C’est la même chose en allant dans des endroits précis aux bons moments par exemple pendant les festivals ou pour des jours particuliers (des marchés qui suivent le calendrier lunaire, etc.).

J’ai jamais fait un lever de soleil et coucher de soleil sur le lac Inle en Birmanie lorsque j’y vivais, alors que c’est très clairement là où il y a les les plus belles couleurs. J’ai du attendre 2017 et le fait de revenir en Birmanie pour enfin faire des photos.

Dernier point important mais il est aussi parfois difficile de trouver de la beauté dans toutes les scènes, l’envie de se lever tôt pour faire de belles photos va aussi parfois se confronter simplement à des scènes… pas vraiment belles. Il n’est donc pas forcément aisé de faire tout le temps des belles photos.

Je vous prends un autre exemple mais lors de mon dernier voyage en Inde j’ai motivé ma femme pour qu’on se lève tôt une fois à Jaipur afin d’aller se balader dans la vieille ville, on a eu quelques scènes magnifiques (et quelques passages pas dingues) mais ça valait le coup !

Erreur #5 : Pas prendre de photos de nuits (alors qu’en vrai je suis doué là dedans)

Je pense que c’est à cause de la Birmanie (où il y a jamais de lumière car c’est un pays vraiment pauvre) mais j’ai mis des années avant de comprendre le potentiel de la photo de nuit. Auparavant lorsque c’était le soir je ne prenais même pas mon appareil photo (et donc… ben pas de photos).

J’ai de très nombreuses fois fait des photos de nuit lorsque j’étais au Japon et à chaque fois ça fonctionnait, mais je pense qu’il me manquait un truc (techniquement) pour faire des photos de ouf. C’était un peu le même problème à Hong Kong où j’ai quand même fait quelques beaux clichés mais… rien d’incroyable non plus. Il manque un grain de folie dans la photo pour la rendre “waouh”.

Au cours des dernières années j’ai acquis une maitrise vraiment plus importante de mon appareil et j’ai donc sorti des photos sublimes à Taiwan ou en Thaïlande. je trouve qu’il y a vraiment un fossé important entre les photos ci-dessus (qui datent de 2014/2016) et les photos que vous voyez ci-dessous (qui sont après 2018).

Erreur #6 : Le premier plan… c’est quoi ce truc ?

J’essaye encore d’apprendre, c’est un concept que j’ai commencé à utiliser seulement récemment car je ne mets quasiment jamais de premier plan dans mes photos. S’il y a un élément devant moi j’ai tendance à photographier par dessus pour passer outre.

Par exemple sur la photo ci-dessous j’aurais sûrement voulu zoomer sur sa tête, cependant ce qui est intéressant c’est aussi d’avoir le contexte et notamment les dames au premier plan.

Même chose ci-dessous avec l’ajout des cacahuètes, ce n’est pas quelque chose que l’on voit souvent et même si le premier plan n’est pas en focus (du tout), ça ajoute quand même quelque chose à la photo.

Erreur #7 : Voir un objectif bizarre comme une contrainte et non comme une opportunité

C’est aussi quelque chose que j’ai mis longtemps à comprendre mais lorsqu’on commence la photo généralement on veut un objectif “qui fait tout”. C’est à dire souvent un zoom avec des chiffres comme : 18-135, 24-105, 28-200, etc. C’est des objectifs qui peuvent prendre des plans larges (pour du paysage) et aussi zoomer pas mal (pour des gens), et c’est d’ailleurs très pratique pour voyager.

Tu vas ensuite rapidement acheter un objectif 50mm car c’est très abordable et que tout le monde te dit d’en acheter. Cependant c’est tellement perturbant par rapport à ton gros zoom que tu ne vas voir que les problèmes :

  • C’est pas flexible
  • Mon téléphone était mieux pour faire la photo d’un paysage
  • Je pouvais pas zoomer sur la personne

Alors que cet objectif a des avantages dingues (qualité d’image incroyable, possibilité d’ouvrir et de faire des flous sublimes, beaucoup plus discret en se baladant, etc.).

Il m’a fallu des années avant d’utiliser régulièrement mon 50mm dans certaines conditions (d’ailleurs tellement d’année qu’entre temps j’en ai mis un à la machine sans faire exprès !). Est-ce que j’utilise mon 50mm tout le temps ? Pas vraiment en revanche j’ai systématiquement le 50mm sur un de mes boitiers lorsque :

  • Je suis dans un marché, car 50mm c’est parfait dans la rue
  • Il fait nuit ou pas loin, car l’ouverture à 1.8 me permet de faire des photos de lieux très sombres
  • J’ai besoin d’avoir un autre point de vue sur un lieu que j’ai déjà visité.

Ce dernier point est vital car le fait d’avoir le 50mm va me forcer à avoir une autre approche, à chercher autre chose dans la photo. Je vous ai mis ci-dessous des photos du marché flottant de Can Tho dans le delta du Mékong et ces photos… ne montrent qu’un aspect de ce marché. J’ai des photos vraiment différentes de ce que je fais habituellement (le plan large sur tout le marché, la photo très zoomée sur une personne). Là il m’a fallu penser différemment :

  • Comment faire ressortir mon sujet ?
  • Comment cadrer mon sujet en utilisant d’autres éléments ?

Bref le fait d’avoir une focal fixe (un objectif qui bouge pas, par exemple un 50mm, un 35mm) va vous engendrer de nombreux problèmes mais va aussi vous apporter autre chose d’un point de vue photographie, pensez-y ! D’ailleurs je suis tombé amoureux de mon 24mm (fixe) qui me suit partout (mais attention car c’est pas un objectif pour tout le monde !).

En résumé :

  1. Les mains disent parfois beaucoup plus qu’un visage
  2. La photographie ça s’apprend, n’hésitez pas à dépenser de l’argent dedans si ça vous intéresse vraiment
  3. Il vaut mieux avoir une photo d’une qualité inférieure (ISO très haut) qu’une photo trop floue
  4. Pour faire de belles photos de voyage il faut… s’en donner la chance (voyager aux bons moments, se lever tôt, faire des longues journées, etc.)
  5. La nuit les opportunités sont parfois limitées, mais elles existent quand même !
  6. Le premier plan peut t’aider à donner du contexte à ta photo
  7. Un objectif bizarre peut te donner un style, ou une autre approche d’un lieu que tu connais déjà

Questions ?

Vous avez des questions sur cet article ou vous faites des erreurs similaires à moi ? N’hésitez pas à laisser un commentaire ci-dessous.